Côte d’Ivoire. Suspect 95’, le Boss du rap !
Par Hortense Assaga.
Du jeune artiste ivoirien Suspect 95, on dit qu’il fait du vrai rap africain. Ses thèmes de prédilection parlent des réalités de la jeunesse africaine avec des punchlines humoristiques. Quand on le rencontre à Abidjan, il s’apprête pour la première fois à performer sur la grande scène du Femua, le festival qui consacre les artistes africains et internationaux. Prestation validée pour ce grand artiste qui sait faire le show et belle rencontre.
Parle-nous de toi au Femua ?
C’est plus qu’un honneur pour moi. C’est le festival qui confirme les artistes ivoiriens. Si tu performes au Femua, ça veut dire que tu es dans la cour des grands. J’ai longtemps attendu ça et les Magiciens ont attendu avant de m’appeler. C’est un cheminement. On monte crescendo. Au début, on est dans l’euphorie de l’artiste, du showbiz et après une certaine sagesse arrive sur le long terme. C’est peut-être ce qu’ils ont vu que le petit frère était prêt à tout donner. Je suis content.
Que t’inspirent les anciens justement ?
A’salfo m’a inspiré la persévérance parce que Magic System, c’est un exemple. Depuis Anoumabo, il est un exemple de professionnalisme. Nous, les artistes africains, parfois, on est dans l’à-peu-près. Eux ont montré que si tu travailles correctement avec une vision sur le long terme, si tu échoues, c’est que ce n’était pas pour toi. C’est aussi comment évoluer et se développer. Partir d’une carrière artistique en Côte d’Ivoire d’abord, arriver à une carrière Européenne, internationale qui explose puis se convertir dans l’institutionnel. Je trouve que c’est l’enchaînement parfait.
Comment on passe de bon élève à artiste dans ton cas ?
Je vois que tu as l’information (rires). Une vraie passion ne se cache pas. Ce n’est pas une question de bon ou mauvais élève. Quand tu es passionné, tu ne peux plus le cacher. Je faisais mes études tranquillement, j’avais de bonnes notes, mais la passion pour la musique est venue. Je me suis concentré pour avoir mon Bac. Je dis merci à mes parents, à ma mère ; sans qui je n’aurai même pas eu cette base. Ce qui fait de moi celui que je suis aujourd’hui, c’est d’avoir concilié les études et la musique. Cela me donne une vision sur ce que je veux faire.
On dit de toi que tu es un narrateur, pourquoi choisis-tu de conter la vie ?
En vrai, j’aime dépeindre les choses. Je vois la musique comme une peinture. J’aime être le canal d’expression de tout le monde. Prendre des thèmes, dire ce qu’on ne peut pas dire. C’est pour cela que j’utilise beaucoup l’humour. Je mets un peu d’humour pour faire passer des messages qui ne passeraient pas si c’était trop sérieux. C’est mon essence, je suis un narrateur, ça me fait plaisir.
Parlons justement de ton sens de l’humour.
C’est mon quotidien, c’est toute ma vie que je mets en musique depuis que je suis jeune. Mon environnement, les relations avec mes parents, les filles, l’art. Je ne vais pas chercher des histoires que je n’ai pas connues. Mon quotidien est assez riche et quand j’aurai fini de le raconter, j’irai peut-être voir ailleurs. Je chante ce qui m’entoure.
C’est quoi cette histoire de 2000 francs que tu chantes ?
Je te donne l’explication. Il y a le Syndicat qui est ma mouvance. J’ai été élevé par ma mère, car mes parents ont divorcé. L’image que j’ai de ma mère, c’est celle d’une femme qui se bat, qui travaille pour nourrir ses sept enfants. Elle y arrivait seule. Quand, plus grand, je vois autour de moi mes grandes sœurs, mes chéries qui ont une vision un peu facile de la vie, qui se mettent avec des gens pour être assistées, je leur dis qu’elles sont à cinq pour cent de leurs capacités. Cette histoire de transport 2000, veut dire qu’il y a des filles qui vont voir leur gars pas par amour, mais pour de l’argent. C’est là que j’ai décidé d’instaurer une somme pour le transport. Comme ça je sais que quand on se voit, ce n’est pas un échange, c’est une envie. C’est symbolique, car avec cette somme, tu ne peux que payer ton transport. Le message est passé.
« C’est une identité d’africain assumé et affirmé. Avant, on était dans le copié-collé. Quand on a commencé à s’affirmer culturellement avec notre accent de bledard, ça a marché. Un rappeur français vient avec son accent, moi, j’ai le mien. Je suis fier d’appartenir à ce groupe qui essaye de donner à la musique francophone. Notre génération agit, elle inspire celle d’après. »
A quelle famille d’artistes urbains appartiens-tu ?
C’est une identité d’africain assumé et affirmé. Avant, on était dans le copié-collé. Quand on a commencé à s’affirmer culturellement avec notre accent de bledard, ça a marché. Un rappeur français vient avec son accent, moi, j’ai le mien. Je suis fier d’appartenir à ce groupe qui essaye de donner à la musique francophone. Notre génération agit, elle inspire celle d’après.
Comment fais-tu pour concilier tous tes métiers et réussir ?
Je suis artiste, présentateur télé, écrivain, entrepreneur, businessman. Je voudrais dire aux jeunes qu’ils n’attendent rien de l’état. Il y a les réseaux sociaux qui ont donné le pouvoir à ceux qui veulent créer. Utilisez les canaux que vous avez pour vous créer. Je suis présentateur télé et certains étudiants en communication se plaignent de ne pas avoir d’opportunités. Je leur dis qu’il ne faut compter sur personne. Il faut créer sa propre opportunité, une chaine YouTube, créer du contenu. Les gens vont te remarquer.