Né le 9 avril 1928 de parents juifs polonais, la vie de Maurice Rajsfus bascule le matin du 16 juillet 1942, quand l’adolescent âgé de 14 ans et sa famille sont arrêtés chez eux par deux policiers, dont l’un est leur voisin de palier. Ils sont victimes de la rafle du Vel’d’Hiv avec les 13 000 juifs, dont plus de 4 000 enfants, qui furent arrêtés ce jour-là par les forces de l’ordre françaises au service du régime nazi. Quelques années plus tard, dans son Journal discordant, Maurice Rajsfus fera cette étrange confidence, celui d’être « en sursis depuis la rafle du Vel’d’Hiv, d’être l’aléatoire titulaire d’un long bail extorqué à ceux qui ont cherché à me détruire, comme ils l’ont fait avec mes parents, avec toute ma famille ».
Les parents de Maurice Rajsfus et sa sœur Jenny seront assassinés à Auschwitz, et ils seront tous les deux envoyés à Drancy. C’est de cette époque que date son amertume envers la France et la police : « J’en veux profondément à la police de ce pays, plus qu’aux Allemands ; sans cette police, les nazis n’auraient pas pu faire autant de dégâts. Depuis 1942, je me sens en retrait vis-à-vis de mes compatriotes : ils ont été plutôt veules, et ça n’a pas beaucoup changé ensuite ». Devenu historien de cette époque, il publiera un premier ouvrage sur l’Union générale des israélites de France (Ugif) intitulé Des juifs dans la collaboration.
Adhérent aux Jeunesses communistes et au PCF dont il sera exclu au motif d’être un « provocateur policier », il se rapproche des milieux trotskistes puis anarchistes, et se lie d’amitié pour les surréalistes. Mais sa rancune est tenace et il avoue en 1992 : « Je m’enchantais de tout ce qui pouvait mettre à mal cette société à qui je n’avais rien pardonné et avec laquelle mes comptes ne seront jamais réglés ». Engagé comme journaliste au Monde, son militantisme se renforce quand il est témoin de la violence des forces de police contre les Algériens le 17 octobre 1961, de la manifestation tragique du 8 février 1962 au métro Charonne, et de Mai 68. Il décide de commencer à traquer les dérapages des forces de l’ordre.
Militant antifasciste et antiraciste, Maurice Rajsfus devient également un « historien de la répression ». Il avait recensé des milliers de dérapages policier qu’il rassemblait sur un bristol et voulait transmettre ses archives d’articles autour des violences policières, qu’il avait méticuleusement constituées de 1968 à 2014. Avec quelques auteurs engagés comme l’écrivain Didier Daeninckx, il avait fondé l’Observatoire des libertés publiques en 1994, et faisait partie du réseau Ras l’Front (contre le Front national), dont il a été le président pendant plusieurs années.
Cité comme témoin de la défense au procès de Maurice Papon pour crimes contre l’humanité, en 1997, il refuse de se soumettre à la convocation et est finalement dispensé. Au président du tribunal il avait alors écrit : « Envoyez-moi les gendarmes. Ça sera bien de voir un rescapé de la rafle du Vél’d’Hiv, fils de victimes, être obligé de témoigner en faveur d’un complice des bourreaux ».
Maurice Rajsfus critiquait sans réserve la politique du gouvernement israélien et défendait la cause palestinienne. Il connaissait bien le Proche-Orient pour y avoir séjourné plusieurs fois et avait écrit plusieurs livres sur le sujet comme « L’ennemi intérieur Israël Palestine » et « Palestine Chronique des événements courants ». Ian Brossat, qui est issu d’une famille de militants et petit-fils de Marcus Klingberg, lui a rendu hommage sur Twitter : « Quelle peine d’apprendre le décès de Maurice Rajsfus, auteur de plusieurs livres sur les violences policières. Il était un ami de mes parents et j’avais eu la chance de le rencontrer dans son appartement de Fontenay-aux-Roses. Admiration et gratitude ».
Les Editions Libertalia ont déclaré : « Maurice Rajsfus vient de nous quitter après un combat inégal de six semaines contre la maladie. Nous poursuivrons ses combats pour la justice et l’émancipation. Ami, ta rage n’est pas perdue » !
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